Impossible, quand on marche, de passer à côté de ce truc!
Annoncé comme le sentier de randonnée le plus dur d'Europe, il a une réputation un peu sulfureuse, savamment entretenue, il est vrai...
En effet, il y a beaucoup de baratin (de marketing?) autour de ce fameux GR 20. Pourtant, si on se contente de marcher selon le programme établi par les topos (seize étapes), on franchit environ 750 mètres de dénivelé par jour, pour des étapes d'environ 6 heures. Ce qui est loin d'être monstrueux.
Simplement, ce qui complique le GR 20, et qui en fait sa renommée, c'est quand on décide de doubler, (voire de tripler pour certains), des étapes. Mais personne n'est forcé. Pour info, certains guerriers parcourent le GR 20 en 5 ou 6 jours. Le record actuel est détenu par François d'Haene en 33 heures environ. Ce qui relativise l'idée même du concept de difficulté ;-)
Ce qui est dur pour nous, simples mortels, sur le GR:
-La chaleur : on est en corse, en montagne ok, mais en corse. Il peut faire chaud, très chaud...
-La météo. C'est lié au premier point : beaucoup d'orages. Parfois violents.
-L'accueil (pourquoi travailler en refuge si on aime pas les gens? un mystère irrésolu pour moi)
Rien de bien grave, donc. La beauté incroyable de ce chemin gomme vite toutes les vicissitudes rencontrées.
Je ne m'étendrai pas sur ce GR, il existe des dizaines de sites et blogs brillants consacrés au sujet. par exemple celui là. Juste quelques photos pour faire durer un peu la féérie.
Pas beaucoup de photos hélas, car, le plus souvent, il n'y a pas de prise dans les refuges, pour les marcheurs. Et, le chargeur solaire portable que nous avions amené n'a jamais fonctionné. Aucune importance. Encore une fois, il y a des milliers de photos et vidéos qui illustrent cette ballade.
J'ai eu la chance de marcher avec mon fils, dont j'ai eu beaucoup de mal à suivre la foulée puissante et agile. C'est ainsi que, 13 jours après notre départ nous sommes arrivés, sans rien calculer, dans les rues brulantes de Conca, rincés mais heureux et émerveillés.
Jour 1
Calenzana - Ortu di u Piobbu
1360 m positif - 60 m négatif
Premier bivouac, la veille du départ au gite communal de Calenzana |
Et c'est partit! je vais essayer de suivre la foulée de ce grand garçon devant! |
Les hauteurs de Calenzana, on aperçoit la baie de Calvi |
Arrêt pipi sous le plus gros chataigner du GR 20 |
Au loin, Calvi |
Nos premières vaches randonneuses |
Bienvenue sur le GR 20 ;-) |
On aperçoit le premier refuge, Ortu di u Piobbu (1520 m) |
Premier bivouac en montagne et première lessive |
Beaucoup de gîtes se font ravitailler par hélico ou.... |
...par mûles |
Jour 2
Ortu di u Piobbu - Carrozzu
780 m positif - 910 m négatif
Départ du gîte, au petit matin |
Un passage assez caractéristique du nord du GR 20 (à éviter sous la pluie) |
Chaleur! |
Dans le goulet, on aperçoit le refuge de Carrozzu (1270 m). Descente infernale! |
Notre bivouac : envahi par les moustiques |
Jour 3
Carozzu - Station d'Ascu Stagnu
800 m positif - 640 m négatif
Je ne retrouve de la batterie qu'arrivé à la Station de ski d'Ascu Stagnu. On profite des commodités : électricité, courses, lessive. On regarde même un match de foot de la coupe du monde (en cours) en buvant une bière. Bivouac parfait le long de l'unique piste de ski.
Donc, une seule photo.
Le jour du 14 juillet, je reste dans mon lit douillet... |
Jour 4
Ascu Stagnu - Ballone
1200 m positif - 1050 m négatif
C'est l'étape la plus éprouvante. Mais peut-être aussi la plus belle. On gravit le monte Cinto (2700 m), dans un décor de rêve pour redescendre ensuite longuement vers le refuge de Tighjettu. La pente est très raide aussi bien dans la montée que dans la descente. Celle-ci s'effectuant en plein soleil! Heureusement, on la la joie pure de se tremper dans un torrent glacé. Bonheur.
Nous pensions dormir autour du refuge de Tighjettu mais, étant arrivés les premiers de la journée, nous avons eu le temps de partager une bière et de discuter avec la gardienne du refuge. Celle-ci, très sympa (à noter, car c'est très rare sur le GR 20) nous donne une info d'une importance capitale : 30 mn de marche plus loin, il y a une bergerie qui possède une télé : nous allons pouvoir regarder la finale de la coupe du monde de foot! Félicité.
La bergerie, rustique, est assez sympa. Nous regardons le match entourés d'une dizaine de corses, supporters de... la Croatie. Nous n'en croyons pas nos oreilles. Même si tout ça reste bon enfant, la victoire des bleus semble donner quelques aigreurs à nos hôtes, dépités. Nirvana.
On grimpe vers le monte Cinto (2706 m), point culminant de la Corse |
Dans un décor de dingo! |
La forêt tout en bas, là bas, c'est d'ici qu'on est partit ce matin. |
Sous les contreforts du sommet |
Arrivé au col, vue à 360 degrés! |
Dans la descente (très dure) on fait la pause... |
...avec une baignade de rêve, bien fraiche! |
On ne s'arrête pas au refuge de Tighjettu (qui donne ici l'échelle à la photo)... |
...on bivouac à la bergerie de Ballone... et sa TV! |
Décor de western |
Jour 5
Ballone - Castel de Bergio
600 m positif - 900 m négatif
Sur le topo, l'étape du jour s'arrête à Ciottulu di i Mori. Nous continuons un peu jusqu'à Castel de Bergio.
L'orage menace, on presse le pas, dans un décor du Seigneur des anneaux |
On plante la tente à Castel de Vergio. Ce matin, en la démontant, j'ai cassé un arceau de ma tente. Et... voilà l'orage. |
On s'abrite le plus longtemps possible avant de rejoindre nos tentes, à contrecoeur. Dans la mienne, tout est trempé. |
Jour 6
Castel de Bergio - Manganu
919 m positif - 710 m négatif
Le lac de Nino, une splendeur |
La bergerie de Baccaghia |
On y achète un saucisson, pour améliorer l'ordinaire des pâtes déshydratées |
Au bout, le refuge de Manganu |
Jour 7
Manganu - L'Onda
1700 m positif - 1200 m négatif
La première étape qu'on double : on arrive tôt au refuge de Pietra Piena et on décide de repartir.
Aucune photo par contre, ma batterie est à plat et aucune prise électrique croisée.
Jour 8
L'Onda - Vizzavona
700 m positif - 1200 m négatif
Vizzavona, située à mi chemin, est la seule ville que vous croiserez sur le GR20. Il y a une gare. Du coup, beaucoup de marcheurs commencent ou finissent ici. Attention, il n'y a pas de distributeurs d'argent et on en connait qui ont été obligé de prendre le train jusqu'à Corte (une journée aller-retour) pour aller retirer des sous...
Une astuce, pour ceux qui sont crevés à l'issue de cette première semaine de marche : pourquoi ne pas prendre une journée de césure afin de se reposer à Vizzavone? En profiter pour aller se baigner aux cascades des anglais à 30 mn de marche. Ou aller dîner de l'autre côté de la rue en face de la gare SNCF (éviter les attrapes touristes, contre la gare) pour un repas corse formidable?
Départ du refuge de l'Onda |
Après les efforts d'hier, la première montée, c'est acide lactique à donf! |
Les cascades des anglais : on y croise beaucoup de familles |
Vizzavona : la seule ville sur le GR20. |
Jour 9
Vizzavona - Capanelle
900 m positif - 220 m négatif
Une de nos plus belle forêt : à la sortie de Vizzavona |
On aperçoit l'extrémité sud de l'île |
Un petit air de Compostelle : le portage de sac par taxi. Plus compliqué en Corse, car il y a peu de routes |
Le programme chaque après midi : planter sa tente, douche, lessive, sieste, bières, diner et re-dodo |
Au milieu ma tente cassée, rafistolée. |
Jour 10
Capanelle - Uscioulu
1700 m positif - 1600 m négatif
Deuxième étape doublée : Arrivés à mi-journée au refuge de Prati, le vent souffle en rafales et l'endroit, assez exposé, de nous inspire pas. On a pas envie d'y patienter toute l'après midi et d'y passer la nuit. Surtout moi, avec ma tente cassée qui s'écroule sur mes jambes. On casse bien la croûte et on décide de continuer jusqu'au refuge de Uscioulu.
On y arrive rincés, voire épuisés. On a manqué d'eau les deux dernières heures de marche. Mais on est heureux d'avoir tapés dans le dur, et de s'en être bien sortis. On boit pas mal de bières pour fêter ça.
On quitte sans regret Capanelle (palme du pire accueil du GR20) |
Sous les sommets, une nappe de nuage recouvre la Méditerranée |
On croise beaucoup de trace d'incendies, les canadairs survolent sans cesse les cimes
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Le relief se fait moins vertigineux, moins minéral, mais la chaleur revient. On sue comme des bêtes. |
Jour 11
Uscioulu - Asinau
840 m positif - 1600 m négatif
On double de nouveau.
Là, c'était prévu pour des raisons de date de retour en avion. C'est souvent les deux étapes que les marcheurs essaient de doubler. Attention, pas si facile.
On arrive très tôt au gîte de Matalza, ou on casse la croute. Un des rares gîte ou l'on est vraiment bien reçu. On s'y attarde un peu. Ensuite, la descente du monte Incundine (2134 m) jusqu'au refuge d'Asinau (1530 m) est une des plus difficiles du GR 20. On arrive au refuge avec les rotules à hauteur des chevilles. Le refuge est sympa, mais tout à fait roots. On adore.
Un chemin plus roulant, mais pas si facile. Le sud, c'est pas "donné"! |
La descente vers le refuge d'Asinau, qu'on aperçoit en bas à gauche : aie ouille aie! |
Jour 12
Asinau - Paliri
440 m positif - 900 m négatif
King Kong ;-) |
Bavela, une merveille... |
Pour un bivouac somptueux. À gauche, ma tente, avec un seul arceau. |
Jour 13
Paliri - Conca
160 m positif - 970 m négatif
Dernier jour. Le plus dur pour moi. Je me sens crevé, et malgré la beauté, une fois de plus, de cette dernière étape, la descente finale vers Conca me semble... interminable.
Dernier jour : et toujours la beauté partout... |
...dans les forêts profondes et fraiches... |
...ou dans les paysages de dingo! |
Mais, nous sommes heureux et soulagés d'apercevoir Conca, point final de notre randonnée. |
Petit retour en bref sur le GR 20
On a adoré bien sûr.
TOUT
Marcher ensemble.
Les odeurs, les couchers de soleil, le silence, les paysages incroyables d'un des plus beaux endroits au monde! Les forêts profondes, les chemins escarpés, les quelques pas d'escalade vertigineux dans le nord, les orages, le saucisson, la Pietra glacée... La finale de coupe du monde, vue dans une bergerie qui n'a pas bougé depuis le XIXe siècle (la mentalité non plus)... Même l'accueil tout à fait ronchon, dans les refuges, nous a fait plutôt sourire.
Surprise : on a croisé très peu de monde. On a marché parfois 1/2 journée sans croiser qui que ce soit. On a rencontré des gens assez sympas. Moyenne d'âge, très jeune. Beaucoup d'athlètes venus là pour relever un défi, des jeunes couples, des familles sportives...
Nous sommes partis en autonomie : une tente chacun (ferrino lightent) aux arceaux fragiles puisque qu'on en a cassé un chacun. Un peu de bouffe, pour les deux premiers jours, puis on s'est ravitaillé ensuite en faisant très attention à notre budget:
- Le matin, pas de petit déjeuner : on mangeait quelques poignées d'amandes et raisins secs à notre première pause
- Le midi, une salade sous vide (3 euros dans tous les refuges) et un morceau de pain
- Le soir, pâtes ou soupe aux pâtes déshydratées avec quelques tranches de saucisson et du pain
Seuls écarts :
-Les bières Pietra et les cacahuètes qui vont bien avec, notre plus gros budget, en fait ;-)
-Un dîner remarquable (pas très cher) à Vizzavona
Le reste de nos affaires : le strict minimum. On portait des sacs de 10 KG pour moi et 13 KG pour Paul, bouffe et eau comprise. Pour la bouffe, une seule popote pour deux. Je n'ai pas pris de réchaud : il y des réchauds en libre service dans tous les refuges. Pour l'eau, il y a de nombreuses sources pointées sur les topos.
On a eu l'impression que la majorité des marcheurs portait des sacs énormes, disproportionnés! Plus de 20 KG parfois! On a rencontré un groupe d'étudiants qui portait leur bouffe pour...les 15 jours du GR! D'autres qui trimballaient des drônes, des caméras, des appareils 5D, des batteries de rechange et des PC portables. Toute une lourde technologie, juste pour le plaisir de se filmer. Dément!
Dernière chose : Nous sommes arrivés avec 3 jours d'avance sur ce qu'on avait prévu. On a pas très bien organisé l'après rando. Tout est cher en Corse. Même pas possible de louer un VTT... On s'est ainsi retrouvés coincés dans un camping à devoir subir les soirées karaoké et miss camping.
On a quand même profité des belles plages de Palombagia, grâce aux navettes.
Et des pizzas géantes.